joi, 18 noiembrie 2021

GEORGE STEINER / 1929-2020

GEORGE STEINER, scriitor şi lingvist franco-anglo-american

Alors que le garçon a six ans, son père, qui croyait qu'une éducation classique était indispensable, lui apprend à lire L'Iliade en grec ancien, lui faisant croire qu'il n'existait pas de traduction allemande

Il disait à son fils : « Avec la lecture, tu ne seras jamais seul »


GEORGE STEINER (n. 23 aprilie 1929, Paris – m. 3 februarie 2020, Cambridge), scriitor şi lingvist franco-anglo-american, cunoscut marelui public în special ca eseist, critic literar şi filozof. După o bursă Rhodes la colegiul Balliol, s-a alăturat, în 1952, echipei editoriale de la publicaţia The Economist. În 1956 a fost ales membru al Institutului de Studii Avansate Princeton. După ce a predat la catedrele universităţilor din Innsbruck, Cambridge şi Princeton, a ajuns, în 1974, profesor de engleză şi literatură comparată la Universitatea din Geneva, unde a rămas până în 1994, când s-a pensionat. De atunci, a susţinut numeroase conferinţe în toată lumea şi a predat la Oxford şi la Harvard. Universalismul său cultural i-a determinat pe unii să-l compare cu Stefan Zweig, Michel de Montaigne şi Erasmus din Rotterdam. A primit numeroase premii, printre care Guggenheim Fellowship şi Chevalier de la Légion d’Honneur. A fost distins, de asemenea, cu ordinul Commandeur dans l’ordre des Arts et des Lettres. A fost membru al Academiei Britanice, iar în 1999 a obţinut Premiul Truman Capote pentru întreaga activitate. În eseuri, a abordat subiecte din domeniile teoriei lingvistice, teoriei traducerii, filozofiei pedagogice, filozofiei politice etc. Selecţie de lucrări: Tolstoy or Dostoevsky: An Essay in Contrast (1960), The Death of Tragedy (1961; trad. rom. Moartea tragediei, Humanitas, 2008), Anno Domini: Three Stories (1964), Language and Silence: Essays 1958–1966 (1967), In Bluebeard’s Castle: Some Notes Towards the Redefinition of Culture (1971; trad. rom. În castelul lui Barbă-Albastră: Câteva însemnări pentru redefinirea culturii, Humanitas, 2013), Extraterritorial: Papers on Literature and the Language Revolution (1972), After Babel (1975; trad. rom. După Babel, 1983), Heidegger (1978), The Portage to San Cristóbal of A.H. (1981; trad. rom. Procesul de la San Cristóbal, Humanitas, 2009), Real Presences: Is There Anything in What We Say? (1989), Errata: An Examined Life (1997; trad. rom. Errata: O autobiografie, Humanitas, 2008), Grammars of Creation (2001; trad. rom. Gramaticile creației, Humanitas, 2015), Lessons of the Masters: The Charles Eliot Norton Lectures 2001–2002 (2003; trad. rom. Maeștri și discipoli: Prelegerile „Charles Eliot Norton“ 2001–2002, Humanitas, 2011), Nostalgia for the Absolute (2004; trad. rom. Nostalgia după absolut, Humanitas, 2021), The Idea of Europe (2005), My Unwritten Books (2008).

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Connaissez-vous George Steiner ? L'arpenteur de toutes nos cultures, présentes et passées, le philosophe qui nous convainc que penser c'est aussi dialoguer avec d'autres langues, d'autres cultures. Car pour Steiner, le don des langues dont il est doté c'est la jubilation de communiquer au lecteur le savoir le plus érudit mais c'est aussi le talent sans égal de raconter la pensée, de la mettre en scène, d'en faire un événement. Il est l'homme aussi bien de l'essai, du récit, de la critique que du roman - pour ce qui relève de la forme - ; quant à son «matériau», en définir les contours reviendrait à défier la Culture même. Pour celui qui «a commis l'indiscrétion d'être juif», le cour de l'ouvre est habité par «la volonté d'être présent», dans tous les sens du terme, «après la Shoah». Est-ce à cet héritage talmudique que nous lui devons ce statut de maître de lecture ? Un maître qui nous fait la courte échelle pour gravir des sommets autrement inaccessibles.

George Steiner   / Œuvres  / Broché (1216 pages)– 28 février 2013 / Éditeur ‏: ‎ Gallimard (28 février 2013)

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George Steiner in romana






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La République des livres


Pour saluer George Steiner

Pour saluer George Steiner

Archétype de l’intellectuel européen à jamais gouverné par les humanités gréco-latines, George Steiner, qui vient de nous quitter à 90 ans à Cambridge, était des rares à séduire durablement son public. A le captiver, l’exaspérer, le surprendre encore. Pour avoir eu maintes fois l’occasion de le rencontrer, de l’interroger ou simplement de le suivre face à de vastes auditoires aussi bien qu’en comité restreint, je puis témoigner de son empire sur ses interlocuteurs (on lira ici une analyse de son œuvre par Donatien Grau, je m’en tiendrais pour ma part au portrait). Rien ne l’enchantait comme la perspective de digresser en public, son sport favori. C’est une bien étrange volupté que de créer des liens hypertexte à l’oral sans que nul n’ait le mauvais goût de vous rappeler au hors-sujet tel un skieur sermonné pour s’être aventuré hors-piste.

Il avait une manière très personnelle de penser en public, à voix haute, étant entendu que ses explosions de pensée reposent sur une longue, intime et ancienne rumination. A 85 ans révolus, il avait encore la pêche et s’épanouissait volontiers dans la polémique, n’étant jamais le dernier à faire preuve d’une ironie mordante, cinglante sinon cruelle à l’endroit de ses adversaires d’un débat d’idées. Il pouvait tenir des heures en se posant des questions dont il disait qu’il mourrait en en ignorant la réponse (« Quelle est la métaphysique d’un sourd-muet ? ») même s’il était persuadé que les grandes réponses précèdent les questions, lesquelles les banalisent. Steiner était un arbre à citations, non pour l’esbroufe mais pour le stimulus (« Musique : art des fiançailles perpétuelles » dixit Merleau-Ponty).

Il en faisait un usage immodéré (« On ne pense en philosophie que sous des métaphores » dixit Louis Althusser) ; s’il avait dû payer des droits d’auteur sur les citations, il aurait été ruiné. Sans compter les frais de justice pour les citations tronquées (« Quelle volupté que d’inventer des citations de Hegel… J’en mets partout ! »). Le plus extraordinaire est qu’il les sortait de son chapeau sans fond, les déployait en magicien et les assénait à un auditoire sans voix, parfois ébloui, parfois perplexe, mais c’était fait avec une telle assurance dans le bonheur de l’intelligence d’un texte qu’on n’osait pas demander : « Euh, quand Alain dit que toute pensée commence par un poème, est-ce que… Et puis quand Leibniz assure que Dieu chante de l’algèbre lorsqu’il soliloque, c’est joli mais… ».

Alors on suivait. D’autant que c’était souvent convaincant. Surtout lorsque Steiner se livrait :

 » Cette pensée du Baal Shem Tov a décidé de ma vie »… « La vérité est toujours en exil ». Cela signifie : méfiez-vous d’une vérité qui se revendique d’une patrie, elle est fausse ».

Il avait beau dénoncer les formules des autres, lui-même ne les détestait pas. Il avait le goût de la pirouette en public, mâtinée d’humour et de provocation. Elle se terminait généralement par une anecdote, mais qui ouvrait sur une méditation, d’autant plus frappante qu’il l’énonçait au présent avec la dramaturgie idoine:

« Comment transcender la logique en gardant la logique ? Un jour, la maîtresse emmène les enfants dessiner dans le motif, à la campagne. Après le pique-nique, elle les asseoit face à un aqueduc. « Dessinez ! » Ils dessinent tous un aqueduc, sauf un qui dessine un aqueduc auquel il a mis des chaussures, à chaque pilier, afin que le monument se mette en mouvement. L’enfant s’appelle Paul Klee, 6 ans. »

Ah, George Steiner et l’art de la chute ! Mais comment, parti avec René Char sur l’idée que la marche est le mouvement même de la pensée, était-il arrivé à convaincre de la présence de Cézanne dans l’ontologie philosophique moderne, on ne le saura pas et quelle importance ? A la fin, il conseillait d’écrire mal, seule solution pour un philosophe sérieux s’il ne veut pas courir le risque d’être lu pour son style. Mais évoquait-t-il les caresses qu’on l’autorisa à prodiguer au « César de Montaigne », son propre exemplaire des Commentaires sur la guerre des Gaules annoté de sa main, le regard de George Steiner déposait les armes ainsi qu’il sied lorsqu’on retient une larme.

George Steiner, qui fut l’un de nos meilleurs critiques littéraires avec Jean Starobinski, et un lecteur hors pair, se souvient avoir remarqué Les Deux étendards, roman de Lucien Rebatet, en son temps grâce à un article laudateur d’Albert Camus, et l’avoir lu aussitôt « Dès la première page, j’ai su que c’était une œuvre de génie et que la création de la jeune femme Anne est comparable à du Tolstoï. Un livre trop long et trop didactique mais avec des parties époustouflantes d’amour et d’humanité. Or Rebatet est aussi l’homme des Décombres, un vrai tueur, le dernier des salauds ». Et Steiner, citant dans la foulée Morand qu’il exècrait, Montherlant qu’il admirait et Pierre Boutang dont il était l’ami, de déplorer « cette injustice kafkaïenne : pourquoi Dieu a-t-il donné autant de talent à la droite ? ».

Difficile d’évoquer un tel homme et une telle oeuvre sans mélancolie tant cet européen polyglotte et cosmopolite incarnait à son meilleur un monde disparu, le monde d’avant pour lequel comptaient des choses, des idées, des valeurs, des références, des principes qui n’ont plus cours que pour quelques uns désormais et l’on ne peut en éprouver qu’une profonde nostalgie au mépris des lazzis que cela susciterait. Chaque matin, il traduisait un poème dans les quatre langues qu’il pratiquait naturellement (français, anglais, allemand, italien) : selon lui, ce rituel avait le don de faire entrer un rayon de soleil dans sa vie quotidienne.

On lui doit aussi des expressions, d’aucuns diront des formules pour en diminuer la portée, telles que « emprise de l’imaginaire ». Elle évoque le délicieux esclavage, l’asservissement volontaire, autrement dit ces fictions suprêmes qui nous obsèdent, ces personnages d’une famille de papier qui finissent par être des personnes de chair et de sang de notre famille secrète ; ils comptent parfois davantage dans notre existence que les vrais gens de la vraie vie. Ils aident à vivre et même à ne pas mourir. On n’échappe pas à ses fantômes familiers. Qui autour de nous aura jamais la présence réelle d’une Mrs Dalloway et d’un Léopold Bloom, d’un capitaine Achab et d’un prince André Bolkonsky, d’un Hans Castorp et d’un K., d’un prince Salina et d’un Trotta, fussent-ils inscrits dans notre mémoire par la puissance du cinéma superposée à celle de la littérature ? Personne.

Nous connaissons tous des lecteurs qui ne se sont jamais remis de la mort de Mme de Rênal. Flaubert lui-même lequel se lamentait sur sa fin de ce qu’il allait crever comme un chien quand cette salope d’Emma Bovary vivrait éternellement. George Steiner, esprit attachant au gai savoir sans répit, était très un grand lecteur, du genre, lui aussi, à ne pas se remettre de ces disparitions mais dans son cas, celles de tant de personnages !

Pour ma part, outre certains de ses grands livres dont la lecture m’a particulièrement marqué (mais après tout, chacun les siens, l’oeuvre est vaste)  tels La mort de la tragédie (1965), Après Babel. Une poétique du dire et de la traduction (1978), Les Antiones (1986), Réelles présences. Les arts du sens (1991), Passions impunies (1997), Maitres et disciples (2003), je n’oublierais jamais la manière dont il voulut conclure un long entretien en public à la Bnf en retirant ses lunettes et en murmurant sur le ton de la confession :

« Je mourrais en ayant conscience de n’avoir pas eu assez de toute une vie pour résoudre un mystère insoluble : pourquoi, lorsque le commandant d’un camp d’extermination nazi, une fois rentré chez lui le soir pour jouer une sonate de Schubert au piano à ses enfants puis lire des poèmes de Hölderlin à sa femme avant le dîner, après avoir passé sa journée à superviser des tortures, des exécutions et des massacres de milliers d’être humains de tous les âges en raison de leur seul crime d’être nés, pourquoi la musique n’a pas dit non, pourquoi la poésie n’a pas dit non ? »

Post scriptum du 5 février : George Steiner a laissé un livre posthume constitué de milliers de « lettres autobiographiques » que le Churchill College (Cambridge) à qui elles ont été confiées révèlera publiquement en 2050 selon la volonté du testateur.

(Photos D.R.)

Cette entrée a été publiée dans Histoire Littéraire.
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George Steiner (1929-2020)

Francis George Steiner, né le 23 avril 1929 à Neuilly-sur-Seine (France) et mort le 3 février 2020 à Cambridge (Royaume-Uni), est un érudit, critique littéraire, linguiste, écrivain et philosophe franco-américain, spécialiste de littérature comparée et de théorie de la traduction.

Auteur de nombreux essais sur la théorie du langage et de la traduction ainsi que sur la philosophie de l'éducation, il est surtout réputé pour ses critiques littéraires, notamment dans The New Yorker et le Times Literary Supplement.

Archétype de l'intellectuel européen, George Steiner est pétri de plusieurs cultures de par son éducation trilingue (allemand, français et anglais). Ardent défenseur de la culture classique gréco-latine, il est un des penseurs européens contemporains à pouvoir lire dans le texte des œuvres écrites en de nombreuses langues (outre le grec et le latin, il maîtrise cinq langues vivantes) et il écrit généralement en anglais.

Il est docteur honoris causa de nombreuses universités et membre de la British Academy. (W.)

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"Ştim că un om poate citi seara pe Goethe sau Rilke, că poate să cânte Bach şi Schubert, iar dimineaţa să meargă la serviciu la Auschwitz." (citat din George Steiner)








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