duminică, 21 noiembrie 2021

Assouline, The French Riviera in the 1920's

  


                                     Hoyningen-Huene for Vogue magazine Juillet 193

01h17 26 juin 2014

Assouline, The French Riviera in the 1920's

L'histoire pourrait débuter ainsi, "Je vous écris depuis la terrasse, où je viens de terminer mon petit-déjeuner, de mèche avec la mer. C’est bien le paradis que vous m’aviez décrit : les gens sont merveilleux, le soleil est chaud. Hier après-midi, quand je suis arrivé, j’aurais pu prendre un bain de soleil !" Ce sont les mots qu'écrivaient Raymond Radiguet à Jean Hugo en Février 1920 à propos de la Côte d'Azur. Lors de cette époque, la Côte d'Azur rayonnait internationalement, elle était le centre d'une agitation culturelle et artistique incroyable, c'est cette richesse et bien plus encore que nous dévoile le livre à paraître chez Assouline, "The French Riviera in the 1920's" sous la direction de Xavier Girard.

J'ai déjà eu le plaisir de me plonger dans l'iconographie de ce très beau livre, y découvrant des images insoupçonnées, exposant aux amoureux de la French Riviera des histoires passionnantes sur cette période assez folle et libre entre les années 1920 et le début des années 1930. Une époque où la création artistique, la créativité, l'élégance étaient élevées au rang de religion.

Ils étaient artistes, écrivains, danseurs, peintres, créateurs de mode... venus du monde entier se retrouver en France sur les rivages de la Méditerranée, le temps d'un décennie qui restera pour l'histoire le point de départ de courants artistiques encore d'actualité aujourd'hui, d'un nouveau mode de vie... ils s'appelaient Scott et Zelda FitzgeraldGerald et Sara MurphyPablo PicassoFrancis PicabiaGabriel ChanelIgor StravinskyJean CocteauSerge de Diaghilev et Anna de Noailles. Des noms à l'influence certaine sur le XXe siècle.

Qui mieux que Xavier Girard, écrivain, critique et historien d’art, essayiste et professeur d’histoire de l’art, déjà auteur aux Éditions Assouline de "La Méditerranée de Homère à Picasso", "Les Symboles du Maroc", "Le Paris des années 1920 avec Kiki de Montparnasse", pour écrire ce livre mariant les thématiques sur la Méditerranée et les années 20... deux sujets qui me tiennent vous vous en douter fortement à cœur ! Ce livre sera disponible chez Assouline en juillet relié sous coffret : 19,5 x 28 cm, 256 pages, 200 photographies, 145€. Encore un peu de patience et il sera le compagnon idéal de vos après-midi estivales...




Hoyningen-Huene for Vogue magazine Juillet 1930




























27 octobre 2015


courtoisie de l'Hôtel du Cap


« Lorsque vos yeux tombent pour la première fois sur la Méditerranée, vous savez tout de suite pourquoi c'est ici que l'homme s'est d'abord dressé et a tendu les bras vers le soleil. C'est une mer bleue ; ou plutôt il est trop bleu pour cette phrase galvaudée qui a décrit chaque mare boueuse d'un pôle à l'autre. C'est le bleu féerique des tableaux de Maxfield Parrish ; bleu comme des livres bleus, du pétrole bleu, des yeux bleus, et à l'ombre des montagnes, une ceinture de terre verte longe la côte sur une centaine de kilomètres et constitue un terrain de jeu pour le monde. "

— F Scott Fitzgerald, Comment vivre de pratiquement rien par an , The Saturday Evening Post , septembre 1924

Lorsque F Scott Fitzgerald traversa l'Atlantique jusqu'en France en 1924, accompagné de sa femme Zelda et de sa fille Scottie, l'idée était de s'échapper dans un endroit où ils pourraient « vivre de pratiquement rien par an ». La raison en était d'une simplicité criante : quatre ans après la publication de son roman à succès, This Side of Paradise (1920), qui a catapulté l'écrivain au rang de célébrité littéraire et fait de lui le héros de l'ère du jazz, Fitzgerald s'est retrouvé avec le capital de seulement 7 000 $. Ne pouvant plus suivre la vie sociale frénétique de New York et les fêtes excessives qui l'empêchaient de terminer son troisième roman, The Great Gatsby, il a pris une décision. Fitzgerald et Zelda ont temporairement quitté leur somptueuse demeure de Great Neck, Long Island, et leur destination finale ne serait pas Paris, mais plutôt le « sud chaud et doux de la France ».
Les Fitzgerald sur la Riviera. Crédit photo : collection de John Michel Sordello

"Nous allions dans le Vieux Monde pour trouver un nouveau rythme à nos vies", a écrit Fitzgerald, dans Comment vivre de pratiquement rien par an , son article sur l'aventure pour The Saturday Evening Post . "Avec une véritable conviction que nous avions laissé notre ancien moi pour toujours."


À l'époque, la vie était encore relativement bon marché sur la Côte d'Azur, en particulier pendant l'été, car, comme Fitzgerald l'a plaisanté, c'était « quelque chose comme aller à Palm Beach pour juillet ». En avril, l'aristocratie en visite ferme ses villas et ne revient qu'en hiver, fuyant les températures élevées, les moustiques et les brises marines insalubres.Une photo vintage de l'Eden Roc. Crédit photo : collection de John Michel Sordello

En mai, les Fitzgerald prirent le train de Paris à la ville endormie de Hyères, sachant qu'Edith Wharton y possédait une maison. La trouvant triste et envahie par des retraités britanniques condescendants, leur déception s'est transformée en joie lorsqu'un agent leur a montré la Villa Marie, une charmante propriété sur une colline ombragée de pins à Saint-Raphaël, que Fitzgerald a décrite comme « une petite ville rouge construite près de la mer, avec de gaies maisons aux toits rouges et un air de carnaval refoulé ».

"Je ne vois pas pourquoi tout le monde ne vient pas ici", s'est exclamé Fitzgerald, ironique, dans Comment vivre avec pratiquement rien par an . « Je vous écris maintenant d'une petite auberge en France où je viens de prendre un repas digne d'un roi, arrosé de champagne, pour la somme absurde de soixante et un centimes. Il en coûte environ un dixième de ce qu'il en coûte pour vivre ici. D'où je suis assis, je peux voir les sommets enfumés des Alpes s'élever derrière une ville qui était vieille avant la naissance d'Alexandre le Grand… »F Scott Fitzgerald en 1921

De juin à octobre, Scott s'est enfermé à la Villa Marie, travaillant sur The Great Gatsby, tandis que Zelda a eu une liaison passionnée mais de courte durée avec un jeune aviateur français, Edouard Jozan, qu'elle a rencontré sur la plage.

"Saint-Raphaël marque la première vraie 'crise' de leur mariage", explique Jean-Luc Guillet, biographe de Fitzgerald, basé sur la Riviera. "Scott était hanté par la trahison de Zelda, et sa peur de perdre sa femme au profit de quelqu'un d'autre apparaît à la fois dans The Great Gatsby et dans Tender is the Night ."Les Fitzgerald en voiture. Crédit photo : collection de John Michel Sordello

À un moment dramatique dans le premier cas, Jay Gatsby dit au mari de Daisy, Tom Buchanan, « Votre femme ne vous aime pas. Elle ne t'a jamais aimé. Elle m'aime".

La faute à ces longs après-midis inactifs et au climat doux. Dans le roman semi-autobiographique de Zelda, Sauve-moi la valse (1932), l'émotion est au rendez-vous car la Riviera « est un endroit séduisant » où « le hurlement du bleu battu et ces palais blancs chatoyant sous la chaleur accentuent les choses ».

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Pour une distraction bien méritée, les Fitzgerald faisaient une escapade dans leur petite Renault bleue, sur la route côtière jusqu'au Cap d'Antibes - en passant devant les roches rouges encore spectaculaires de l'Estérel et les bas-fonds turquoise du golfe de la Napoule - pour visiter leur amis proches, Sara et Gerald Murphy.Photo des années 1920 de l'Eden Roc Cap d'Antibes. Crédit photo : collection de John Michel Sordello

Mieux connu comme les premiers modèles de Fitgerald pour Dick et Nicole Diver dans Tender is the Night (1934), le charisme des Murphys se résume dans les premiers chapitres du roman, qui se déroulent sur la plage de la Garoupe, au Cap d'Antibes. côté est. Parlant des Divers et de la Riviera, le musicien américain alcoolique Abe North dit à la star de cinéma récemment arrivée Rosemary Hoyt qu'« ils doivent aimer ça. Ils l'ont inventé ».

Gerald Murphy, riche héritier de l'entreprise de maroquinerie de luxe Mark Cross, s'était installé à Paris avec sa famille afin d'étudier la peinture. Ses qualités de pionnier se sont également étendues à sa sensibilité créative moderne, car il a produit des toiles et des décors d'avant-garde qui peuvent clairement être considérés comme un précurseur du Pop Art. Accompagné de son élégante épouse, Murphy découvre l'enchantement du Cap d'Antibes à l'été 1922, lorsque leur ami Cole Porter les invite à séjourner dans sa villa louée, le Château de la Garoupe.Vue aérienne de l'Hôtel du Cap. Crédit photo : Sordello

Décidant qu'ils voulaient s'installer au milieu des villages de pêcheurs endormis du Cap, les Murphy sont revenus l'année suivante et ont convaincu le propriétaire de l'hôtel balnéaire du Cap-Eden-Roc - le modèle de l'hôtel des Étrangers de Tender is the Night - de le garder. ouvert pour eux pendant l'été.

Pendant que leur nouvelle maison, la Villa America, était en construction, l'Hôtel du Cap-Eden-Roc est devenu le quartier général des Murphy et un endroit pour inviter leurs amis. Aujourd'hui, l'Hôtel du Cap-Eden-Roc, c'est l'un des lieux de séjour les plus fastueux d'Europe. Leur cercle charmé comprenait des voisins comme le comte et la comtesse de Beaumont, qui vivaient dans la splendide Villa Eilenroc; Picasso et sa mère, Senora Ruiz, et sa femme ballerine, Olga ; l'icône du cinéma muet Rudolf Valentino ; et Gertrude Stein.

*********La façade des Belles Rives. Photo reproduite avec l'aimable autorisation de l'Hôtel Belles Rives

Avec leur mariage sous tension, Antibes était une évasion bienvenue pour les Fitzgerald, dont les pitreries notoires et alimentées par l'alcool étaient à la hauteur de la mauvaise conduite des rock stars les plus dissolues. Sur un défi commun, ils ont une fois perturbé la fête des Murphy à l'Hôtel du Cap en plongeant des rochers de 10 mètres de haut dans la Méditerranée noire.

Un autre soir, Zelda a enlevé sa culotte en dentelle noire et l'a jetée à ses hôtes, encourageant une baignade impromptue dans la piscine avec d'autres invités en état d'ébriété. À une occasion plus sérieuse, Zelda a avalé une grande quantité de somnifères et a ensuite dû se promener dans les jardins de l'hôtel jusqu'au matin.

Bien que les Fitzgerald reviennent à New York à l'automne, la gaieté alléchante de la Riviera les ramène à l'été 1926. À la suite du succès de Gatsby , Scott loue la Villa Saint-Louis à Juan-les-Pins, se vantant de son amis à New York qu'il avait trouvé une maison sur le rivage avec une plage privée, idéalement située près du casino. C'est là que Fitzgerald a commencé à travailler sur Tender is the Night , ce qui lui a pris sept ans.

En 1929, la villa Art déco est transformée en petit hôtel familial Belles-Rives. Son mobilier d'époque, ses fresques et son fumoir ont été méticuleusement conservés par l'actuelle propriétaire, 

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Le Bar Fitzgerald, du nom de l'auteur. Courtoisie de l'Hôtel Belles Rives

À la Villa America, la maison moderniste des Murphy de 14 pièces – dotée d'un salon carrelé de noir, d'une terrasse sur son toit plat et d'un jardin exotique – les Fitzgerald se sont mêlés aux figures les plus en vue de la scène artistique européenne : Cocteau, Léger, Man Ray, Stravinsky, Diaghilev et bien d'autres. Les noms littéraires qui étaient des invités réguliers comprenaient Ernest Hemingway et sa femme, Hadley (plus tard, également Pauline Pfeiffer, sa deuxième épouse), John Dos Passos, Dorothy Parker, Archibald MacLeish et Robert Benchley.

"L'air sentait l'eucalyptus, les tomates et l'héliotrope", a rappelé Dos Passos, décrivant les soirées d'été langoureuses sur la terrasse de Villa America. Gerald Murphy, élégamment vêtu de guêtres ou de « bucks » blancs et d'un maillot de marin rayé, préparait des cocktails élaborés pour ses invités, comme le dit Dos Passos, « comme un prêtre préparant la messe », inventant des concoctions « avec le jus de quelques fleurs » .


Lors d'une de ces fameuses soirées , immortalisée par la suite dans Tender is the Night, Scott Fitzgerald s'est comporté encore plus mal que d'habitude - il a insulté les invités, puis a ramassé une figue imbibée de sorbet et l'a jetée sur les épaules nues de l'ami de ses hôtes, la princesse de Poix. Une fois, Fitzgerald a commencé à briser les verres à vin soufflés à la main de Sara Murphy, alors il a été escorté jusqu'à la porte et le couple l'a banni de la Villa American pendant des semaines.Une carte postale vintage de l'Hôtel Belles.

Monte Carlo était une destination parfaite pour les « mangeurs d'excitation », comme Zelda se référait à elle-même et à Scott. Ils emprunteraient la sinueuse Grande Corniche « à travers le crépuscule avec toute la Côte d'Azur scintillante en contrebas » et passeraient la soirée à jouer au Casino. Si Scott avait oublié son passeport, il ferait semblant de s'évanouir devant le garde de la salle de jeux, espérant qu'ils le laisseraient quand même entrer.

Un autre point chaud glamour était le restaurant artistique La Colombe d'Or à Saint-Paul-de-Vence, qui était déjà un repaire de célébrités. Un soir, alors qu'il dînait sur la terrasse, Scott a repéré Isadora Duncan à la table voisine et est allé lui rendre hommage. Par la suite, Zelda était jalouse et, en représailles, s'est jetée dans une volée de marches de pierre.

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Quand il s'agissait de dîner, les Fitzgerald évitaient la cuisine française élaborée et méprisaient l'ail - "le seul ail qui peut être mis sur nous doit être administré pendant le sommeil". Même dans les restaurants les plus exclusifs, Scott faisait signe au serveur et commandait un club sandwich dans son français fortement accentué.

Lors du dernier été du couple sur la Côte d'Azur, en 1929, la Bourse américaine s'était effondrée et l'ambiance avait radicalement changé. Les Fitzgerald se sont retranchés dans une modeste villa de Cannes, évitant l'Hôtel du Cap qui, pour Scott, était devenu un cirque de célébrités où les clients en pyjama de soie n'utilisaient la piscine « que pour une courte gueule de bois ». Somerset Maugham ferait également la satire de la scène sociale déchaînée de l'hôtel dans sa nouvelle, Les trois grosses femmes d'Antibes.

Zelda, qui montrait déjà des signes de fatigue mentale, était toujours déterminée à devenir ballerine. Séjournant à l'Hôtel Beau Rivage sur la Promenade des Anglais à Nice, ils se sont rendus « aux ballets bon marché du Casino sur la jetée » en essayant désespérément de faire des économies.Une carte postale vintage de l'Hôtel Belles Rives

Au moment où Tender is the Night a été publié, en 1934, les Murphy et les Fitzgerald étaient depuis longtemps revenus en Amérique, et les deux familles ont subi une série d'événements tragiques. Les Murphy ont perdu leurs deux jeunes fils, Patrick et Baoth, à cause de la maladie, tandis que Zelda était dans et hors des sanatoriums, aux prises avec de graves dépressions mentales.

Ce qui restait de ces années, comme l'évoquait Fitzgerald, était la lueur d'un âge d'or sur la Riviera, lorsqu'une poignée d'expatriés américains a inventé un mode de vie durable consistant à bronzer, nager et faire la fête sur la Côte d'Azur.

Gerald Murphy écrivit plus tard à Fitzgerald : « Je sais maintenant que ce que vous avez dit dans Tender Is the Night est vrai. Seule la partie inventée de notre vie – la partie irréelle – a eu un schéma, une beauté ».

L'auteure américaine d'art et de voyages Lanie Goodman est basée dans le sud de la France depuis 1988. Elle a écrit pour Condé Nast Traveler, le Los Angeles Times et The Guardian.

Du magazine France Aujourd'hui
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Scott Fitzgerald au Belles Rives de Juan-les-Pins

Chaque semaine, nous vous faisons découvrir un hôtel mythique et, au-delà, une ville entière, à travers les yeux d'un écrivain célèbre qui y a séjourné. Aujourd'hui, Juan-les-Pins et l'hôtel Belles Rives, l'ex-villa Saint-Louis où résida l'auteur de «Tendre est la nuit».

Voici le cas, sans doute unique, où l'écrivain précède l'hôtel, suscite peu ou prou sa création et continue d'en inspirer le style. « L'illustre homme de lettres », en l'occurrence, est un beau et sale gosse américain, un débutant fêté qu'on ne saurait dissocier de son épouse, encore plus jeune. Francis Scott Fitzgerald et Zelda, à peine un demi-siècle à eux deux. C'est le golden couple des années 1920, flamboyant et déjà un peu flambé. Au commencement des Roaring Twenties, ayant quitté les États-Unis coupables à leurs yeux d'avoir voté le dix-huitième amendement (la prohibition), ils veulent vivre vite, de coups d'éclat et de feux d'artifice plutôt que de bouts de chandelle. À Paris qui, comme chacun sait, est une fête, il ne s'en donne pas une sans eux. « Beaux à en désespérer » (Dos ­Passos), ils sont les princes de la génération perdue capitale Montparnasse , attachée de presse Gertrude Stein. Mais la faran­dole finit par les saouler. Dans tous les sens du terme.

Modèles et mentors

« And two for tea/And me for you ». L'auteur de la rengaine fournit une échappatoire. Cole Porter, qui donne aussi le ton en matière de mœurs, a décrété que rien ici-bas n'égalait la Côte d'Azur hors saison, c'est-à-dire, dès le mois de mars. Ses amis Murphy partagent la même dilection. Gérald, héritier bostonien d'une sorte d'Hermès yankee, et Sara Murphy forment un couple également jeune, séduisant et vraiment riche. Entichés des « Fitz », dont ils figurent à la fois les modèles et les mentors, ils les invitent à rejoindre la petite bande d'Américains snobs et excentriques très Yale, Harvard, membres des Skulls and Bones qui robinsonnent au Cap-d'Antibes, odorant et grec à souhait. Sans le savoir, ils y lancent la mode des baignades, des peaux nues et cuivrées, le deuxième âge d'or de la Riviera.

Zelda et Scott qui a besoin d'écrire au calme sont toujours partants pour de « miniodyssées ». Et le taux de change fait de tout Américain un nabab. En 1924, Gatsby le Magnifique lui rapporte 28 000 dollars. Une maison se loue autour de 60 dollars par mois ; un sachet de poudre blanche coûte 20 cents. Pour le prix d'une seule nouvelle, Scott achète un coupé 6 CV Renault, qu'il conduit comme un sagouin… S'agissant des diverses demeures occupées par ce couple déménageur entre Hyères et Nice, la seule qui importe est la villa Saint-Louis à Juan-les-Pins. Parce qu'elle récapitule toutes les autres, qu'elle est la matrice romanesque de Tendre est la nuit, en grande partie écrit là et parce que Scott en a dit ceci : « De retour à ma Riviera bien-aimée dans une belle villa, je suis plus heureux que je ne l'ai été depuis des années. C'est l'un de ces étranges, précieux et trop éphémères moments où tout semble bien aller. » Le dandy mélancolique, petit neveu de Baudelaire et de Poë, parlant de bonheur ! Ne serait-ce que pour cette raison, Saint-Louis méritait de passer à la postérité.

C'est une sorte de fermette néonormande, adossée à la fameuse pinède et sise en bord de mer, sur ces terrains qui ont alors si peu de valeur qu'on les abandonne aux filles sans dot. À l'époque, seules les hauteurs sont chics. Picasso vit à portée de voix de Saint-Louis. Un peu plus haut encore, au château de Juan-les-Pins, réside le gentil bellâtre, Rudolph Valentino… Alors, ce bonheur de 1926, faut-il le cantonner au mol emploi du temps de l'été : plage, collation, sieste, plage, dîner, soirée, le tout arrosé jusqu'à plus soif ? Les Murph' sont très sherry, mais tout ce qui se boit est bu… S'agirait-il d'une félicité conjugale ? Si tel est le cas, ce serait à la Fitzgerald. Depuis leur première brouille, prémari­tale, ils vivent sur le registre fusionnel : ni avec toi ni sans toi. Tu bois ? Je m'abrutis d'alcool… Tu lances de la crème glacée dans le décolleté de la princesse ; tu gâches la fête donnée en l'honneur de Hemingway (à juste titre d'ailleurs, ce carriériste est un faux ami) ? Je danse sur la table du casino, jupe retroussée… Tu conduis comme un fou ? Je te demande du feu dans le virage au bord du ravin… « L'instinct de conservation n'est pas notre fort », note placidement Zelda. Leur « couple de dingues » (dixit Scott) a besoin d'excès, mais aussi de l'antidote qu'offre Saint-Louis, où tout semble si frais, si neuf. En tout cas, la parenthèse se referme fin 1926. Francis Scott Fitzgerald est appelé à Hollywood, et Zelda, qui commence à entendre les fleurs lui parler, entame sa tournée des cliniques. Ils vont vers le dénouement que l'on sait. Mais la maison du bonheur leur survivra.

Innocence dorée

Un émigré russe, Boma Estène, sensible au génie du lieu et à la légende du « dernier couple romantique », comprend en outre que l'avenir sera balnéaire. Alors que tout le monde l'en dissuade, il acquiert la villa Saint-Louis, l'augmente d'une aile et de deux étages, qu'un architecte hellénise avec goût. Le Belles Rives est né. Au destin décousu des Fitz, il ajoute un épilogue.

Marianne Estène-Chauvin, troisième du nom, n'a pas eu à faire de « revivalisme ». Le décor et le mobilier Art déco sont ceux des origines. De sorte que le petit palace raconte les Années folles avec le naturel d'un témoin de l'époque. La citation de Scott sur son bonheur à Saint-Louis, le Belles Rives l'a gravée dans une pierre. Accrochée un jour à l'un des murs de l'entrée, en présence des petits-enfants des Fitzgerald, elle semble désormais un message posthume personnellement adressé à l'hôte de passage. L'histoire se prolonge ainsi avec une rare élégance… Et dans l'escalier, qui est resté celui de la villa, « nimbés de leur innocence dorée », voici qu'ils descendent en tenue de soirée, frac noir pour Scott, robe peau d'ange de Molyneux pour Zelda, souriants, légèrement gris. Ne les voient que ceux qui les aiment. Sans paraître remarquer leurs propres portraits, ils poussent la porte vitrée d'autrefois, font quelques pas sur la terrasse, s'accoudent à sa rambarde. Ils regardent les étoiles filantes s'abîmer sur les îles de Lérins comme ils s'abîmèrent avant elles et se taisent, enfin réunis dans la tendre nuit de Juan-les-Pins.

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The Glamorous French Riviera

The French Riviera or the Côte d’Azur as we know it was invented by the arty expatriate set in the 1920s. Picasso painted it. Cole Porter crooned it. But no one celebrated the Côte d’Azur more tenderly than F Scott Fitzgerald. The legendary novelist lived it up on the Riviera and left his mark on the region. From the glamorous summer season to the glittering guest list, it’s still his Riviera party that we want to be part of. And the party is in full swing – even if you’re a gatecrasher.

Juan les Pins view from road with trees, sea then buildings in background
Juan les Pins. Public domain via Wikimedia Commons

The Jazz Age

B/w photo of Charlie Parker 1947 playing the saxaphone
Charlie Parker (‘Yardbird’ or just ‘Bird’) in 1947. Public domain via Wikimedia Commons

It’s 90 years since Cole Porter and Scott Fitzgerald resided here, raised hell with their Hollywood friends and persuaded the glitterati the Côte d’Azur was the place to party. His great novel,The Great Gatsby captures the essence of the era fondly known as the ‘Roaring Twenties’, as does Tender is the Night. The French Riviera is still romancing the Jazz Age, from the glittering parties to the restless spirit that chimes with our times.

Scott Fitzgerald’s France

Paper cover of the Great Gatsby
https://maryannesfrance.com/culture/the-french-riviera-great-gatsby-style/







sâmbătă, 20 noiembrie 2021

Hitler et les Femmes / François Delpla

 


François Delpla / Hitler et les femmes, 2016

 Que sait-on au juste de la vie sentimentale d’un homme responsable de la mort de millions d’autres  ? Et que peut-elle nous apprendre sur son œuvre de destruction  ?
Ainsi, ses relations avec sa camarade de parti Jenny Haug, puis avec Friedelind Wagner, Unity Mitford ou Maria Reiter visaient-elles seulement le commerce intime  ? Quant à Winifred Wagner et Leni Riefenstahl, à défaut de lui avoir apporté la plénitude amoureuse, n’auront-elles pas contribué à son ascension en répondant à son dévorant besoin d’admiration  ?
De la passion funeste de Hitler pour sa nièce Geli Raubal, poussée au suicide à 23  ans, à son mariage tardif avec Eva Braun, François Delpla autopsie une vie amoureuse qui aurait pu être très ordinaire si elle n’avait été si chaste. Il étudie ces relations tantôt séparément tantôt simultanément, sans jamais omettre leur contexte politique.
 
Spécialiste du Troisième Reich, François Delpla est normalien et agrégé d’histoire, docteur habilité à diriger des recherches. Auteur de nombreux ouvrages sur la Seconde Guerre mondiale et le nazisme, il est également l’un des récents biographes d’Adolf Hitler. Il a notamment publié en 2014 Une histoire du Troisième Reich (Perrin) et, en 2016, la traduction en deux volumes des Propos intimes et politiques d’Hitler (Nouveau Monde éditions).

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Hitler et les Femmes

François Delpla

Nouveau Monde, 2016 - 9,00 €

 Mathieu Souyris |  1 Mai 2017 | Allemagne nazie (1933-1945)

« Hitler et les femmes »…avec un tel titre, on est à priori enclin à la méfiance. La peur d’avoir à rendre compte d’un ouvrage bâclé et racoleur, aux limites du fait-divers croustillant, à défaut d’être émoustillant. Il n’en est, heureusement, rien, et c’est une bonne chose. Car l’étude proposée par François Delpla sur les relations entre Hitler et les femmes s’inscrit dans une vaste révision (dans le sens scolaire, évidemment) de l’histoire du personnage et du nazisme en général. Avec un plan chronologique, on revoit donc l’ascension de l’activiste autrichien devenu chef du NSDAP, sa victoire, sa pratique du pouvoir, la préparation de la guerre et l’échec final par le prisme des femmes. On retrouve aussi certains thèmes chers à François Delpla, comme l’explication de l’arrêt de l’offensive sur Dunkerque en 1940 ou sur les raisons qui menèrent à la nuit des Longs Couteaux. On reste un peu sceptique faute de sources quand il affirme que lors de l’effondrement final la fuite d’Himmler et de Göering était simulée et voulue par Hitler afin de tester les Alliés. Mais c’est un autre débat.

Sur les femmes, on trouvera de nombreuses figures : sa mère, celles qui l’ont soutenu, celles qu’il a séduites, aimées, utilisées, oubliées. Parmi les plus marquantes, on notera Unity Mitford, aristocrate britannique, Winifred Wagner, belle-fille de Richard Wagner, Geli, nièce d’Hitler, Eva Braun bien sûr mais aussi Leni Riefensthal la cinéaste et Magda Goebbels. L’idée générale est que Hitler était avant tout dédié corps et âme à l’Allemagne et à l’accomplissement de ce qu’il prenait comme une sorte de destinée romantique. D’où l’idée de ne pas se lier, et surtout pas se marier, avec une femme. Après le suicide de Geli, Eva Braun sera sa maîtresse uniquement, sauf à quelques jours de la fin où il consentira à l’épouser dans une sordide finale. On voit aussi la nécessité d’Hitler de se confier, de parler, d’être rassuré par des femmes de façon régulière, et notamment à la veille de grandes décisions, où il leur impose ses longs monologues. Le magnétisme exercé par le dictateur semble être important, à défaut de ses attraits physiques, et de nombreuses femmes rencontrées par Hitler ne regrettent rien à posteriori. C’est ainsi pour être proche d’Hitler que Magda Goebbels consent à épouser le ministre de l’information et de la propagande, qui n’est pas un Adonis, et, quand tout est fini, c’est elle qui décide l’holocauste final de sa famille en honneur de celui qu’elle considérait sans doute comme un demi-dieu.

Les femmes apaisaient donc Hitler, qui leur vouait souvent une sorte de passion contrariée, dérangeante et piégeante (on le voit bien avec le sort de Geli, sa nièce). On voit aussi Hitler en marieur, faisant épouser celles qu’il aimait à des cadres importants du parti. On voit aussi qu’il passe plus de choses aux femmes qu’aux hommes. Ainsi aux deux seules femmes qui lui reprochent ouvertement son antisémitisme, Leni Riefensthal et Henriette Hoffmann, l’une est remise à sa place, l’autre est oubliée, mais aucune n’est inquiétée pour sa vie quotidienne. Il y a quelques mots sur la libido d’Hitler, qui a donc connu l’acte sexuel de façon assez intermittente et brève avant de se focaliser sur Eva Braun, la plus « people » de ces admiratrices. J’utilise le mot « people » à dessein, car de 1933 à 1938 c’est une véritable cour de célébrités qui entoure Hitler, dans un monde qui n’a rien à envier à celui d’Hollywood.

Au final, l’ouvrage se lit très bien, d’autant plus que nous en connaissons l’issue, et en abordant aussi d’autres personnages masculins, comme Rudolf Hess ou Albert Speer, permet une approche complémentaire de la période 1920-1945 en Allemagne et en Autriche.

Mathieu Souyris, lycée Paul Sabatier, Carcassonne

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Son grand amour : sa nièce Angelika Raubal (1908 - 1931)

Son grand amour : sa nièce Angelika Raubal (1908 - 1931)

Angelika dite Geli, la fille de sa demi-sœur, a 21 ans de moins que lui. Adolf Hitler en est follement épris. Il l'héberge à partir de 1929. Le 17 septembre 1931, Geli se tire une balle dans le cœur avec l’arme de son oncle. Cherche-t-elle à fuir un homme aux pulsions incontrôlables ? Peu de temps avant, elle confiait à un ami : "Mon oncle est un monstre. Personne n’imagine ce qu’il exige de moi."

photo 1/7© Ullstein Bild via Getty Images

Eva Braun (1912 – 1945), sa compagne officieuse

Eva Braun (1912 – 1945), sa compagne officieuse

De 1931 à 1945, Eva Braun partagea la vie du Führer, bien qu’elle ne fut jamais présentée comme sa compagne officielle auprès des Allemands.

photo 2/7© DPA/ABACA

Magda Goebbels (1901-1945), la "première dame du Troisième Reich"

Magda Goebbels (1901-1945), la "première dame du Troisième Reich"

Hitler avait beaucoup d'admiration pour cette jeune femme cultivée, issue de la haute société berlinoise, devenue nazie fanatique. C'est le Führer qui l'a poussée dans les bras de Joseph Goebbels, qu'elle a suivi dans toutes les cérémonies officielles et visites d’Etat. Elle se suicide le 1er mai 1945 à Berlin en compagnie de son mari après avoir empoisonné leurs six enfants.

photo 3/7© Hedda Walther / ullstein bild via Getty Images

Sa secrétaire Traudl Junge (1920 – 2002), ici en 1943 au bras de Hans-Hermann Junge, officier SS, mort au combat en 1944

Sa secrétaire Traudl Junge (1920 – 2002), ici en 1943 au bras de Hans-Hermann Junge, officier SS, mort au combat en 1944

"Après les révélations sur les crimes de cet homme, je vivrai jusqu’à ma dernière heure avec le sentiment d’avoir été complice…" Traudl Junge, la naïve et insouciante secrétaire d’Hitler, livre cette confession dans ses souvenirs (Dans la tanière du loup, éd. Lattès, 2005), qui ont inspiré le film La Chute. Jusqu’à sa mort, elle sera en proie à la culpabilité, minée par une dépression la ramenant à l’époque où elle vécut dans l’intimité du Führer.

photo 4/7© akg-images / Imagno

Leni Riefenstahl (1902 – 2003), sa réalisatrice favorite

Leni Riefenstahl (1902 – 2003), sa réalisatrice favorite

Cette jeune danseuse devenue actrice puis cinéaste fit preuve d’une dévotion sans faille envers Joseph Goebbels et Hitler... On lui doit notamment Le Triomphe de la volonté (1935) long-métrage où le Führer apparaît en demi-dieu. Et Les dieux du stade, un documentaire de propagande sur les Jeux olympiques de 1936. Cette figure ambiguë échappera à la traque des nazis après la guerre pour poursuivre sa carrière dans la photographie avant de mourir centenaire, en 2003.

photo 5/7© Bundesarchiv, Bild 146-1988-106-29 / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

Son amie Winifred Wagner (1897 – 1980)

Son amie Winifred Wagner (1897 – 1980)

Sa "dame vénérée", avec qui il passe des heures à discuter d’art, lui fournit le papier pour écrire Mein Kampf en prison, suite à sa tentative de coup d’Etat à Munich, en 1922. Dans les années 1930, Hitler reste lié à la belle-fille du créateur de la Tétralogie, laquelle fait du festival de Bayreuth (où ne sont représentées que les œuvres de Richard Wagner) un rendez- vous mondain du régime.

photo 6/7© Bettmann / Contributeur via Getty Images