duminică, 9 ianuarie 2022

Proust

 

A la recherche du Paris de Proust

Le musée Carnavalet célèbre l’écrivain du Paris de la Belle Époque.

« Longtemps je me suis couché de bonne heure ». Cette phrase culte est en quelque sorte incarnée dans la chambre qui sert de charnière aux deux parties de l’exposition : son lit, recouvert de bleu, un panneau mural de liège pour étouffer le bruit, sa pelisse et sa canne, une montre à gousset, un plumier à tiroir, l’encrier et l’essuie-plume, des paperolles dévotement découpées par Céleste sur lesquelles il notait ses corrections, la Vue de Delft par Vermeer. Et la dernière photographie sur son lit de mort prise par Man Ray à la demande de Jean Cocteau, à côté d’un médaillon contenant une mèche de cheveux.

Mais l’objectif de Carnavalet n’est pas de commémorer le centenaire de la mort de l’écrivain. Musée de Paris, il a recherché dans sa vie (première partie) et son œuvre (seconde partie) des évocations de la capitale réaménagée par Haussmann. « J’avais toujours à portée de main un plan de Paris » lit-on dans Du côté de chez Swann. Un plan indique ses adresses favorites, domiciles et éditeurs, tailleur Charvet, place Vendôme, torréfacteur Patin, rue de Lévis, pharmacie Leclerc. Et s’il est clair qu’à la différence de Victor Hugo ou Émile Zola, son Paris n’est guère populaire, la peinture qu’il en donne est tout aussi précise.

Le parcours évoque les lieux auxquels Proust était attaché, des appartements des grands-parents à ceux dans lesquels il vécut de sa naissance en 1871 à sa mort, le 18 novembre 1922. Son enfance se déroule entre Auteuil, chez son grand-père, et la rive droite, où se regroupent aristocratie et bonne bourgeoisie, dont les médecins comme son père Adrien. Élève à Condorcet, puis à Sciences Po et à la Sorbonne, il est très jeune attiré par les mondanités et les salons. Le poète dandy Robert de Montesquiou lui ouvre les cercles aristocratiques du faubourg Saint-Honoré et de la plaine Monceau où il rencontre ses futurs personnages. Des photographies, lettres et vidéos redonnent vie à ses familiers, Robert, le frère complice, condisciples, aristocrates et dames du monde, Reynaldo Hahn avec lequel il noue une orageuse amitié amoureuse, Gaston Calmette, Émile Zola – présent dans Jean Santeuil – Anna de Noailles. Ou Léon Daudet qui, bien qu’antisémite, le soutient pour le Goncourt en 1919.

On se promène dans l’île Saint-Louis où vit Swann, « infamante » par sa proximité avec la Halle aux Vins ; au Café anglais ou au Ritz où Proust aimait dîner. On découvre sa curiosité pour la technique, tel le théâtrophone de Clément Ader qui permettait d’écouter à distance des opéras : il s’y abonna dès 1911 pour entendre Wagner ou Debussy retransmis. On apprend la fascination du salonnard pour les pionniers de l’aviation, son intérêt pour l’actualité, l’inondation de 1910 ou la visite en 1896 de Nicolas II, devenu roi Théodose dans la Recherche. On voit aussi son souci inattendu du pratique : en 1906, il demande conseil à une amie pour déménager son mobilier. Sans oublier le Paris de l’ombre et des secrets, des hôtels de rencontres, les rendez-vous des homosexuels. Des box, tout au long du parcours, permettent d’entendre de courts extraits évocateurs.

Depuis 1971 la petite ville d’Illiers, dans l’Eure-et-Loir, a accolé Combray à son nom en hommage à Proust, qui y passait ses vacances chez tante Léonie pourvoyeuse dominicale de madeleines ; il n’empêche : peu d’écrivains furent, dans leur vie et leur œuvre, aussi parisiens que lui.

Huguette Meunier


Marcel Proust, un roman parisien, jusqu’au 10 avril au musée Carnavalet-Histoire de Paris, 23 rue de Sévigné.

Informations et réservation sur le site du musée Carnavalet - Histoire de Paris .


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Exposition “Marcel Proust, un roman parisien” au musée Carnavalet – Histoire de Paris – Entretien avec Anne-Laure Sol

« Marcel Proust, un roman parisien » au Musée Carnavalet – Histoire de Paris

Du jeudi 16 décembre 2021 au dimanche 10 avril 2022

 

 

 

Rencontre avec Anne-Laure Sol, conservatrice en chef du patrimoine, responsable du département des Peintures et Vitraux, musée Carnavalet – Histoire de Paris et commissaire de l’exposition.

 

 

HL- Le musée Carnavalet – Histoire de Paris consacre une grande exposition à Marcel Proust au moment où l’on commémore le 150e anniversaire de sa naissance. Etait-ce une évidence pour votre musée ?

 

ALS – Oui, d’abord parce que le Musée Carnavalet – Histoire de Paris a vocation à retracer l’histoire de la ville et de ses habitants, qu’ils soient célèbres ou anonymes. L’autre grande raison est que le musée conserve la chambre de Marcel Proust depuis 1973, grâce au collectionneur et bibliophile Jacques Guérin, qui fit don au musée du lit et de la pelisse à col en fourrure de l’écrivain. [À ce sujet, on lira avec profit l’excellente enquête de Lorenza Foschini, Le manteau de Proust (La Table ronde, 2012)].

 

 

Ce don a été complété dans les années 1980 par Odile Gévaudan, fille de Céleste Albaret, qui offrit une série d’objets ayant appartenu à Proust et cette année par Françoise Heilbrun, conservateur en chef au Musée d’Orsay, qui fournit un fragment du couvre-lit.

 

 

 

HL – Une belle histoire que celle de ce morceau de tissu qui servit de point de départ pour recréer l’atmosphère et la couleur de la chambre de Proust qui vient tout juste d’être rénovée ?

ALS – La couleur du couvre-lit a servi de point de départ à un travail de recherche mené de concert avec la Société des Amis de Marcel Proust pour retrouver la teinte bleue d’origine et recréer ainsi l’atmosphère nocturne de la chambre dans le parcours permanent du musée. C’est aussi grâce au mécénat de la maison Pierre Frey qui s’est chargé de la création de ces rideaux bleus qui plongent la chambre dans une sorte de nuit, telle que Proust devait l’apprécier.

On y trouve même un fragment des panneaux de liège qui recouvraient la chambre du 102 boulevard Haussmann. Il faut savoir que c’est la poétesse Anna de Noailles qui avait confié cette idée à Proust pour se protéger des bruits extérieurs.

Cette importante collection de reliques matérielles, toutes liées à la vie de l’écrivain, conjuguée à l’anniversaire de sa naissance donne tout son sens pour organiser une exposition sur la relation de Proust à Paris.

 

HL – Comment avez-vous conçu le parcours de votre exposition ?

ALS – Nous avons deux grandes parties qui constituent le Paris de Proust et le Paris du Narrateur, pour répondre à la dimension biographique qui figure dans la Recherche du temps perdu. La première partie de l’exposition retrace la biographie de l’écrivain et s’intéresse à sa famille, ses loisirs, ses centres d’intérêts, puis au boulevard Haussmann et au moment de la genèse de l’écriture de la Recherche, avec notamment l’évocation de sa chambre.

La deuxième partie de l’exposition s’intéresse davantage à la place de Paris dans le roman et aux principaux lieux rencontrés : les Champs-Élysées et le Bois de Boulogne en particulier. Ce sont la topographie ou les personnages qui matérialisent un aspect de la ville, comme les figures de Swann ou de Charlus par exemple.

Ce sont environ 280 œuvres qui sont réunies, mêlant des peintures, des sculptures, des œuvres graphiques, des photographies, des accessoires et des vêtements, des affiches, des manuscrits et des documents d’archives, provenant de collections publiques et privées, françaises et étrangères, donnant un ensemble particulièrement riche et varié.

 

Plan du Paris de Proust © Hôtel Littéraire Le Swann

 

HL – Comment avez-vous essayé de rendre les fameux « Cris de Paris » décrits par Proust dans son roman ?

ALS – Nous avons une section consacrée à ce morceau d’anthologie avec des photos d’époque et de très beaux dessins qui représentent tous ses petits métiers. Et nous avons fait en sorte que les visiteurs puisent entendre des extraits avec de nombreux dispositifs audio tout au long du parcours, assis ou debout devant les œuvres, enregistrés par des acteurs de la Comédie française ou par les Éditions Thélème.

 

Il y a aussi beaucoup de films et des documents archives, comme l’itinéraire de Roland Barthes dans Paris, ou encore le documentaire de Roger Stéphane, les images du mariage Greffulhe à l’église de la Madeleine sur lesquelles on aurait tant aimé que ce fut Proust ! Nous avons essayé de rendre les choses vivantes pour permettre aux visiteurs de trouver de grands repères.

 

 

HL – J’imagine que Céleste Albaret n’a pas été oubliée ?

ALS  – Oui bien sûr, Céleste Albaret est largement représentée, par une très belle photo appartenant aux collections de l’Hôtel Littéraire Le Swann et un extrait documentaire particulièrement émouvant, celui dans lequel elle raconte la dernière nuit de Proust.

 

 

Propos recueillis par Hélène Montjean

 

Le prix Céleste Albaret 2021 sera remis au musée Carnavalet – Histoire de Paris lors d’une soirée exceptionnelle le jour de l’ouverture de l’exposition, jeudi 16 décembre. Les invités pourront ainsi profiter d’une visite nocturne de l’exposition, un rêve pour tous les proustiens.

 

Musée Carnavalet, salle des enseignes

Musée Carnavalet – Histoire de Paris

23, rue de Sévigné
75003 Paris


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